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En octobre 2015, la Commissaire européenne pour le Commerce, Cécilia Malmström, a présenté un projet conférant des droits considérables aux investisseurs étrangers dans tous les accords commerciaux à venir de l’Union européenne. Ce projet a été rendu public au moment même où les citoyens s’inquiétaient de plus en plus de l’inclusion du « mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et états » (RDIE ou ISDS en anglais) dans les accords commerciaux de l’Union européenne - Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement (TTIP ou plus communément TAFTA) et Accord économique et commercial global (CETA) entre le Canada et l’Union européenne. On a assisté, avec l’application de ce mécanisme dans de nombreux traités internationaux sur le commerce et l’investissement, à une envolée des procédures engagées par les entreprises contre les états qui prennent des mesures règlementaires pour protéger la santé, l’environnement et l’intérêt public.
La Commission a promis que sa nouvelle approche relative à la protection des investissements - fondée sur le projet de « Système juridictionnel des investissements » formulée lors des négociations du TAFTA – « protègerait les droits des gouvernements à promulguer des lois et garantirait que les conflits commerciaux seraient jugés en stricte conformité avec l’Etat de droit ». Par ailleurs, d’autres membres de la Commission ont promis que certains des cas les plus flagrants qui sont devenus emblématiques des torts et injustices du mécanisme RDIE, ne pourraient plus avoir lieu dans le système « réformé ».
Ce rapport a voulu vérifier le bien fondé de ces promesses et a examiné cinq des affaires les plus controversées et emblématiques, engagées avec le mécanisme RDIE, au cours des dernières années.Nous avons voulu vérifier si de telles affaires pourraient encore se produire dans le cadre du « Système juridictionnel des investissements » et comprendre si ce dernier représente vraiment un changement important par rapport aux injustices actuelles du mécanisme d’arbitrage RDIE ou si, comme de nombreux experts juridiques et porte-paroles de la société civile l’affirment, il ne s’agit pour la Commission européenne que d’un changement d’appellation.
Une analyse attentive de chacun de ces cas controversés montre qu’elles pourraient toutes encore être engagées sous le « Système juridictionnel des investissements », avec de bonnes chances d’obtenir gain de cause. Rien dans la proposition n’empêche les entreprises de contester les décisions des gouvernements de protéger la santé et l’environnement. Et rien n’empêche les arbitres de décider en faveur des entreprises et d’ordonner aux Etats de payer des milliards de compensation avec l’argent des contribuables, pour des mesures légitimes prises par les pouvoirs publics.
En d’autres termes, si on analyse le « Système juridictionnel des investissements », on constate qu’il est incapable d’empêcher qu’une de ces affaires controversées n’ait lieu à nou- veau.En outre, ce rapport a constaté les faits suivants:
5. Le « Système juridictionnel des investissements » est truffé de qualificatifs mal définis et confère aux entreprises des droits étendus. Leur interprétation dépend toujours d’arbitres intéressés financièrement et qui ne remplissent pas les exigences requises pour des juges publics et indépendants. Ces arbitres seront payés au cas, et les failles des exigences de l’Union européenne concernant les conflits d’intérêts permettront à ce même groupe d’arbitres favorables aux entreprises de continuer à siéger dans les panels d’arbitrage. Des juges européens ont aussi conclu que les propositions du « Système juridictionnel des investissements » ne satisfont pas aux normes minimales requises pour une fonction judiciaire, telles que fixées dans la « Grande Charte européenne des juges » (Magna Carta) ou dans d’autres textes internationaux relatifs à l’indépendance des juges.
DChacune de ces affaires controversées pourrait encore se produire dans le cadre de cette approche prétendument réformée de l’Union européenne. Cela montre que la Commission européenne a été incapable d’écouter les millions de citoyens européens qui exigeaient que soit mis fin aux privilèges injustes des entreprises. Le règlement des différends investisseurs-états, quel que soit le nom qu’on lui donne, est un système anti-démocratique, dangereux, injuste et partial. Il est grand temps que la Commission européenne arrête sa campagne de relations publiques et de changement des appellations, et qu’elle commence à tracer un chemin vers des échanges commerciaux équitables. Pour cela, elle doit abandonner une fois pour toutes, l’arbitrage privé, à commencer par le CETA et le TAFTA, ainsi que dans les autres accords commerciaux de l’Union européenne.
Publié par: Canadian Centre for Policy Alternatives, Corporate Europe Observatory, Friends of the Earth Europe, Forum Umwelt und Entwicklung, Transnational Institute